Les trois textes d’aujourd’hui nous rappellent la solidarité et la responsabilité qui existent, d’une façon ou d’une autre, dans la chaîne humaine que nous formons toutes et tous. Dans ces trois lectures, il est question de la vie en communauté. En raison de la diversité de nos vies et de nos caractères et aussi avec toutes les lois liées à la protection de la vie privée, nous devons reconnaitre que la vie en communauté ne va pas de soi. Lavie est sacrée. Chacun fait de sa vie ce qu’il veut et personne n’a le droit de s’en mêler. Cette attitude entraîne inévitablement une espèce d’indifférence, les uns vis-à-vis des autres. On laisse pourrir certaines situations aberrantes et désastreuses : des enfants maltraités, des familles qui se disloquent, des violences, des injustices criantes, des personnes âgées abandonnées, des jeunes qui sombrent dans l’alcoolisme ou la drogue…Le tout au nom de la soi-disant liberté individuelle. Mais curieusement, cette indifférence n’empêche pas de glisser de temps à autre un petit commentaire dans lequel on parle non pas à l’autre, mais de l’autre.
Or, une communauté, dans le sens d’une vie partagée ensemble, requiert une vraie communion de pensée, d’objectifs, d’amitié et d’amour. Il n’y a pas d’échange ni de partage entre des personnes qui ne se connaissent pas, étrangères les unes aux autres. L’étranger, bien sûr, au sens figuré du terme. Parce que l’on peut vivre sous un même toit, être d’une même famille, tout étant étrangers les uns des autres. Une réelle communion n’existe qu’entre amis, entre frères et soeurs. Dans l’évangile, Jésus dit: « Si tu vois que ton frère a commis un péché, va lui parler seul à seul ». Un frère et une sœur ne sont pas n’importe qui. ! Ce sont des personnes avec qui on a des relations privilégiées, des êtres que l’on aime, et avec qui on entretient des liens solides d’amitié, d’affection. Un frère, une sœur sont des personnes dont on ne supporte pas de les voir s’enfoncer dans le mal. Mais surtout des gens avec qui on a l’habitude de parler franchement. On sait leur parler avec tact, délicatesse, dans une écoute mutuelle fondée sur l’amour.
C’est dans ce contexte qu’intervient un avertissement fraternel. « Va le trouver seul à seul », nous dit Jésus. C’est un peu dans le sens de la dette d’amour dont nous parle Saint Paul. On ne peut pas laisser celui ou celle que l’on aime s’enfoncer dans le mal sans s’en préoccuper. Et quand nous nous sentons aimés ; nous restons ouverts et disposés à accueillir une remarque de l’autre, de façon polie et respectueuse. Dans ce cas, je ne me sens pas enfoncé, blessé ni écrasé. Je ne suis pas en face de quelqu’un qui me donne des leçons, inspiré par la jalousie ou le mépris. Je comprends vite que ce que l’autre me dit est inspiré par une profonde amitié et par le souci de me protéger, de me prévenir d’un danger, bref de me sauver.
Ces conseils de Jésus sont utiles pour nous éviter certaines petites bombes à retardement, qui finissent par éclater tôt ou tard. C’est pourquoi, comme avec Jérémie, nous sommes appelés à être des guetteurs les uns pour les autres. Le guetteur n’est pas celui qui part en guerre, mais celui qui avertit du danger menaçant, qui sonne l’alarme et réveille les assoupis. Un guetteur n’est pas un redresseur de torts, ni un espion curieux, mais il veut le bien de ses frères, en les protégeant du mal. Il n’est pas à l’affût des fautes, des erreurs, des faiblesses ou des faux pas…Il est celui qui met l’amour en priorité. Or, que signifie aimer, si ce n’est d’abord se réjouir et vouloir le bien des autres. C’est aussi le rêve et la volonté de Dieu.
Wenceslas Mungimur Saint-Laurent/ Virton