Aujourd’hui, nous réentendons la parabole du Bon Samaritain, qui est fort connue.
Il serait peut-être bon pour nous d’apprendre que l’amour du prochain n’est pas une nouveauté apportée par Jésus. La première lecture de ce dimanche, le Livre du Deutéronome, le dit : la loi du Seigneur est inscrite dans le cœur de chaque être humain. Bien avant lui, les gens pratiquaient cette vertu d’aimer son prochain. Pour comprendre la touche complémentaire apportée par Jésus, il serait intéressant d’interpréter chaque élément dans son contexte. Nous pourrions ainsi supposer que le bon Samaritain représente le Seigneur et l’homme blessé sur la route serait le symbole de l’humanité. Jéricho peut être considérée comme le lieu perdu dans le désert, là où se trouvent les brigands et tout le mal qu’ils représentent. Tandis que le prêtre et le lévite, qui passent leur chemin, peuvent figurer la loi et le culte, tous deux incapables de sauver l’homme blessé. L’huile dont le bon Samaritain se sert serait considérée comme l’action de l’Esprit-Saint. Et, enfin, l’auberge représenterait l’Église à qui l’humanité est confiée, en attendant le retour du Seigneur.
Le Samaritain pose son geste et continue son chemin. Il repassera plus tard pour voir l’état de santé du blessé et pour régler la note. Autrement dit, il le remet debout avant de continuer son chemin lui aussi. En quelque sorte, il ne prend pas son protégé en otage, il ne le prend pas avec lui, ne lui impose pas non plus un comportement à adopter. Il ne s’appesantit pas sur celui qu’il a remis debout et ne lui impose pas non plus une attitude paternaliste. Par ce comportement, Jésus nous fait découvrir que notre Dieu est un Dieu de traversée, un Dieu en chemin, qui aide à reprendre la route celles et ceux qui n’en peuvent plus.
Nous aussi, à l’exemple du Samaritain, nous sommes interpellés sur notre attitude vis-à-vis du pauvre, du blessé de la vie, du marginal, de l’étranger. Il ne s’agit pas pour nous de prendre sa place ni de résoudre pour lui le problème de son avenir, ni de savoir tout à sa place, ni de lui dire ce qu’il doit faire. Bien sûr, ceci n’est pas facile pour chacun de nous. À certains moments, il nous faut apprendre à nous effacer pour laisser l’autre être lui-même, afin qu’il prenne ses responsabilités, afin qu’il prenne sa vie en main… Quant à nous, à l’exemple du Seigneur, le bon Samaritain, nous continuons notre propre voyage, toujours vigilants et prêts à aider sur notre route d’autres victimes de la violence, de l’exclusion et du mal.
Il saute aux yeux, en lisant cette page d’évangile, que Jésus veut interpeller les scribes et les pharisiens, ces personnages qui exécutent la loi avec minutie, ces « gens bien » comme on dit, dont l’observance méticuleuse de la loi est la principale préoccupation bien plus que les conditions de vie de leurs semblables. Cette histoire d’une autre époque n’est pas dépassée, elle est de tous les temps et aujourd’hui plus que jamais.
Il est étonnant de constater que, dans nos pratiques, nous sommes plus dans le « faire » ou la « parole » que dans « l’être » ; souvent plus soucieux de dogmes et du scrupuleusement correct dans nos célébrations et liturgies qu’impliqués dans la vie concrète, le témoignage, l’exemple à montrer et le service à rendre.
Heureusement il y a de nombreux chrétiens et autres personnes qui, sans tambour ni trompette, dans l’anonymat, silencieusement, veillent à ce que personne dans leur voisinage ne se sente seul ou abandonné. Ils sont nombreux, dans l’Église, qui viennent au secours de celles et ceux qui errent sur des chemins de souffrance. Oui, la parabole du Bon Samaritain est toujours vivante dans notre société et l’amour du prochain également.
Wenceslas Mungimur